Une cuma pour désamianter les bâtiments agricoles
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Toitures, planchers, plafonds... Les bâtiments agricoles n’échappent pas à l’amiante qui a inondé les constructions durant le XXe siècle. Or, ce matériau, interdit depuis 1997
Toitures, planchers, plafonds… Les bâtiments agricoles n’échappent pas à l’amiante qui a inondé les constructions durant le XXe siècle. Or, ce matériau, interdit depuis 1997, est cancérigène lorsqu’il se dégrade, explique David Mussard, médecin conseiller à la MSA lors d’un webinaire organisé par le réseau des pathologies respiratoires agricoles national.
En 2020, le ministère de l’Agriculture a commandé une étude avec la chambre d’agriculture des Pays de la Loire pour « Améliorer les connaissances sur la problématique de l’amiante dans les bâtiments agricoles ».
Diviser le coût du désamiantage par deux
Dans ce cadre, l’étude a tenté d’évaluer la « faisabilité d’une cuma de désamiantage ». L’objectif était de pouvoir certifier une cuma spécialisée dans les chantiers de « sous-section 3 » (chantier de retrait ou confinement de matériaux contenant de l’amiante) et « sous-section 4 » (travaux ponctuels de maintenance, réparation ou entretien). Normalement, les travaux de sous-section 3 doivent être réalisés par une entreprise certifiée, tandis que ceux de la sous-section 4 par un personnel formé.
La cuma serait, d’après l’étude, un moyen de « réduire de moitié le coût global d’un chantier », estime David Mussard, passant de 60 à 70 €/m2 à 29 à 32 €/m2. Par son statut associatif, la cuma permettrait de réaliser « à prix coûtant » les travaux.
Les cuma s’engagent auprès des citoyens (16/04/2024)
Pour l’instant, un groupe d’agriculteurs intéressé par une Cuma de désamiantage a dû se stopper en raison de craintes sur la responsabilité juridique du président de Cuma en cas de poursuites pénales.
De manière générale, l’étude commandée par le ministère s’attelle sur la nécessité de sensibiliser le monde agricole à cet enjeu, via l’explication des risques d’une exposition (cancer du poumon en particulier) et sur les besoins de se protéger avec des équipements adaptés.
Car l’amiante des bâtiments agricoles est un enjeu d’actualité. En se basant sur le recensement agricole (avec les données concernant les bâtiments et leur taille) et en modélisant des bâtiments types pour chaque atelier, l’étude est arrivée à un résultat édifiant : dans les Pays de la Loire, plus de 3 000 bâtiments, équivalents à 2 millions de m2, seraient contaminés par l’amiante, d’après la modélisation. « Cela montre le potentiel de gisement d’amiante dormant et le potentiel de l’exposition grimpante car les bâtiments vont se dégrader », commente David Mussard.
Règlementation
Lorsque les permis de construire de bâtiments agricoles datent d’avant 1997, les agriculteurs doivent établir un dossier technique amiante (DTA) pour rechercher si le bâtiment a de l’amiante afin d’éviter l’exposition et d’envisager de potentiels travaux de maintenance ou de retrait de l’amiante.
Si un agriculteur doit effectuer des travaux dans un bâtiment, il doit réaliser un repérage amiante avant travaux (RAT) afin d’examiner la procédure à suivre. Si la présence de matériaux et de produits contenant de l’amiante est repérée, il est interdit d’intervenir soi-même. Il faut alors réfléchir à caractériser la nature des travaux, de sous-section 3 (désamiantage avec une entreprise agréée) ou sous-section 4 (travaux de maintenance avec un personnel formé).
Comme de nombreux agriculteurs réalisent souvent leurs travaux eux-mêmes, l’étude commandée par le ministère envisage aussi de financer des formations pour que les agriculteurs puissent réaliser eux-mêmes les travaux de sous-section 4 (comme des travaux sur toiture en fibrociment). Deux formations de deux jours « adaptés aux besoins des agriculteurs » ont été respectivement menées et financées par Vivea en mars 2023 et mars 2024.
En France, l’amiante représente aujourd’hui la deuxième cause des maladies professionnelles.
Lire l’article complet de Johanne Malin pour La France Agricole